Un petit tour dans le vaste Monde, une pause dans une salle de spectacles, un détour par la cuisine ou auprès du sapin de Noël ... deux ou trois créations … Bienvenue chez moi , agréable visite, et n'hésitez surtout pas à laisser un commentaire. Pour être informés des articles récents, n’oubliez pas de vous abonner. A bientôt.
Ce matin nous quittons MONTAGU, un nom aux consonnances françaises alors qu’on le doit à John Montagu, secrétaire de la colonie britannique du CAP. La jolie petite ville est renommée pour ses activités viticoles et agricoles, produisant pommes, poires, et pêches.
Aujourd’hui au programme : OUDTSHOORN, nous nous arrêterons visiter un élevage d’autruches et nous y déjeunerons (en mangeant de l’autruche !) nous irons ensuite voir CANGO CAVES, de belles grottes.
Nous traçons la route, R62, plutôt monotone, suivant toujours cette grande vallée agricole, on passe devant de grandes exploitations, grandes fermes qui ressemblent à des haciendas, blanches et entourées de murs blancs. Nous sommes toujours en « territoire » boer.
Nous avons laissé les hollandais, et les français, dans la région de STELLENBOSCH.
En 1834, les anglais décrètent l’abolition de l’esclavage, les boers n’acceptent pas de devenir les égaux de leurs esclaves. Ils décident de partir guidés par leur foi, convaincus qu’une Terre Promise les attend plus loin. Ce grand départ, en 1835, est le Grand Trek, ces pionniers vont aller vers le nord et l’est conquérir de nouveaux territoires se déplaçant dans des chariots tirés par des bœufs. On les appelle les Voortrekkers. Sur la route, ils mangent du biltong, de la viande séchée, en principe de bœuf mais qui peut être de koudou, autruche ou springbok. Ces lamelles de viande sont devenues le plat typique sud-africain.
Mais le territoire n’est pas vierge, les afrikaners vont devoir se confronter aux populations locales zoulou, Ndebele ou xhosa, peuples nomades chasseurs. Les zoulous sont un peuple déjà très organisé, avec à leur tête le chef Dingaan, successeur d’un despote tyrannique nommé Shaka. Jusque là les contacts avec les quelques colons blancs se passaient sans souci, basés sur du troc. En 1838, un groupe de pionniers vient, pacifiquement, négocier des territoires avec le furieux Dingaan qui ordonne le massacre des émissaires avant d’aller exterminer le reste du groupe faisant 500 victimes (300 blancs et 200 esclaves) et volant le bétail sans se préoccuper de savoir s’il existe d’autres caravanes de ces voortrekkers. Grave erreur, sous la direction d’Andries Pretorius, les autres pionniers se regroupent, et organisent une attaque près de la rivière Ncome, le 16 décembre 1838, on appellera cette confrontation sanglante la bataille de Blood River, la rivière devenue rouge du sang des 3 000, voire 5 000, guerriers zoulous morts ce jour là alors que seulement 2 afrikaners y perdirent la vie.
Dingaan fuit tandis que son successeur pactise avec les blancs qui vont s’établir dans la région de Natal, là où Vasco de Gama avait débarqué un jour de Noël, et fonder la République de Natalia dont la capitale sera PIETERMARITZBURG, autrefois uMgungundlovu (place des éléphants). Piet Retief et Gert Maritz, chefs boers durant le Grand Trek, ont donné leurs noms à cette ville, toujours capitale mais désormais de la province du KwaZulu-Natal.
Certains de ces boers vont s’établir dans cette région tandis que d’autres poursuivent la route vers le Mozambique ou font demi-tour pour retourner vers le Transvaal, se heurtant cette fois aux anglais soucieux, eux, de ne pas laisser les boers gagner trop de terrain. Mais ce petit état est mal géré, l’abolition de l’esclavage ne permet pas à ces grands fermiers de trouver la main d’œuvre suffisante pour faire face aux importants besoins de la nouvelle culture en vogue, la canne à sucre.
En 1867 on trouve des diamants dans le Tranvaal, en 1886 de l’or vers JOHANNESBURG, les anglais vont vite réagir, en 1877, ils envahissent le Transvaal pour l’annexer. Les boers mettent trois ans à s’organiser avec à leur tête Paul Kruger, Andries Pretorius et Piet Joubert. En 1880 ils triomphent des troupes anglaises et obtiennent la reconnaissance de la République Sud-Africaine, le Transvaal, Paul Kruger en sera le président.
Mais en 1900, les anglais reprennent le contrôle des territoires après une guerre qui va laisser le territoire des afrikaners exsangue et les boers humiliés.
En 1902 on célèbre enfin la réconciliation entre les deux rivaux. L’Union Sud-Africaine voit le jour en 1910, réunissant quatre provinces : Le Cap (britannique) et Natal, Transvaal et Orange, autrefois aux boers. Les populations noires ne sont pas invitées aux négociations et dans une grande partie du pays elles n’auront aucun droit. Déjà, en 1908, un projet voyait le jour, le South Africa Act visant à bâtir un état basé sur l’inégalité entre blancs et non-blancs. En 1912, une loi est ainsi promulguée pour réglementer les relations interraciales et favoriser l’emploi des blancs, la « colour bar » (la barrière de couleur) ; en réaction les noirs se mobilisent et créent le SANNC (South African Native National Congress) qui deviendra l’ANC (African National Congress) en 1923.
La Première Guerre Mondiale va bousculer les relations entre les blancs, les anglais étant favorables aux alliés (l’échec de l’Allemagne leur offrant l’opportunité de récupérer les colonies allemandes en Afrique), les boers penchent eux pour l’Allemagne. Les noirs, eux, soutiennent l’effort de guerre demandé par les anglais et espèrent obtenir un geste de reconnaissance pour cet appui, mais il n’en sera rien ce qui cristallisera davantage les rancœurs raciales.
Le basculement se produit au moment de la Deuxième Guerre Mondiale. Encore une fois les blancs se divisent, certains boers étant ouvertement pro-nazis et évoquant déjà la séparation raciale. En 1948, Daniel Malan, un de ces boers durs, devient premier ministre, il fait alors voter des lois interdisant les mariages entre blancs et noirs, puis les relations sexuelles et la stricte séparation des races. Trois races sont définies : blancs, noirs et métis.
Les lieux publics vont êtres réservés à l’une ou l’autre race, les non-blancs sont fichés, en cas de doute ils doivent subir des examens humiliants pour déterminer à quelle race ils appartiennent.
En 1950, les populations sont déplacées pour être séparées. C’est à cette époque que SOWETO est créée. Pour les noirs, et de façon moindre les non-blancs, les accès à la propriété, éducation, santé et travail sont limités. Ils doivent se déplacer avec un pass (et les autorisations préalables) et sont emprisonnés en cas de défaillance, les mathématiques ne leur sont plus enseignées, les conditions sanitaires sont déplorables.
En 1961, la République Sud-Africaine voit le jour, nation régie par la séparation raciale – l’Apartheid. Les noirs ne restent pas inactifs bien sûr, et organisent la résistance.
Dès 1942 Nelson Mandela prend la tête, avec Olivier Tambo et Walter Sisulu, de la Youth League, la branche des jeunes de l’ANC. Il ouvre le premier cabinet d’avocats noirs en 1953. Activiste plutôt pacifiste, il prône des méthodes telles que la grève, le boycott, mais pas la violence. Il sera malgré tout arrêté et condamné en 1962. Il ne sera libéré qu’en 1990.
La société sud-africaine est donc fortement fracturée, entre blancs, non-blancs, et des hiérarchies dans ces deux catégories, un antagonisme latent entre les afrikaners, qui conservent leur langue et culture dans les régions du nord-est et les anglais plutôt concentrés au CAP, terreau des « blancs progressistes » qui luttent contre l’apartheid. Chez les non-blancs, la situation n’est pas la même pour les métis et les noirs.
Silo nous rappelle la date de création des villes principales d’Afrique du Sud : 1662, LE CAP ; 1679, STELLENBOSCH ; 1855, PRETORIA, dues aux boers ; 1835, DURBAN, fondée par les anglais et finalement en 1886, JOHANNESBURG, la ville des chercheurs d’or.
Quand on met cette histoire, ces dates en perspective avec le paysage qui défile on ne peut être qu’impressionné par le courage, l’audace de ces pionniers sans moyens partis coloniser ces terres inconnues, peuplées de tribus hostiles et d’animaux impressionnants !
Le paysage est presque désertique, coincé au pied des massifs montagneux. Plus personne n’habite dans ces sombres montagnes, la vie s’est concentrée dans les vallées où on voit de temps en temps des fermes, quelques maisons collées les unes aux autres, encore quelques vignobles ou des champs d’aloé vera, et presque toujours de longues clôtures limitant des parcelles vides. Pour nous le ciel reste très couvert mais il ne pleut pas.
Cette route est belle, 2 fois 1 voie pour cette longue transversale, peu fréquentée. Il y a quelques « aires de repos » qui se résument à un petit dégagement sur le bas-côté avec au moins une table et des bancs en ciment, plusieurs parfois et dans le meilleur des cas ils sont à l’ombre d’un arbre famélique.
Nous avons traversé la ville de BARRYDALE, connue pour son brandy et ses fromages. Maintenant nous arrivons à LADISMITH, une ville en majorité noirs et métis.
La route devient plus montagneuse, c’est le Petit Karoo (Klein Karoo), massif où vivaient les KhoïKhoïs et les bushmen qui s’abritaient dans les nombreuses grottes, dont les fameuses Cango Caves que nous irons voir plus tard.
Nous voyons nos premières gazelles ! Ca c’est le top du dépaysement ! des gazelles dans les champs, comme on verrait des biches chez nous !! et encore !!
On passe à CALITZDORP, ville agricole et viticole, capitale du vin de « port », un vin doux qui ressemble au porto. Comme toujours, l’entrée en ville est annoncée par un bidonville en tôle, puis les petites maisons données par l’état, avant d’arriver dans le centre, plutôt agréable.
Silo, poursuit ses explications, mettant maintenant l’accent sur la politique « post apartheid » favorisant les noirs. En stigmatisant, on peut dire que les noirs sont pauvres, tandis que les descendants des hollandais sont de riches fermiers ; les lois incitent maintenant à l’embauche de noirs et de métis, fixant des pourcentages pour favoriser l’accès à l’emploi. Ici il n’y a pas de salaire minimum, mais des grilles de salaires négociées par profession. Mais bien sûr, en fonction de la région, le minimum pour assurer une vie décente n’est pas le même ce qui fait qu’une forme d’apartheid perdure, les salaires les plus moyens (des noirs) ne pouvant assumer les loyers chers des quartiers blancs. C’est ainsi que la population blanche est beaucoup plus importante au sud, dans les grandes villes que dans le nord.
Le constat est le même au niveau de l’enseignement, gratuit et accessible à tous, sauf que l’école publique gratuite ne bénéficie pas des mêmes moyens que les écoles privées, les classes sont surpeuplées (jusqu’à 90 élèves !), les budgets dérisoires. Dès que les parents en ont les moyens, ils scolarisent leurs enfants dans des réseaux privés. La plupart du temps, l’école « gratuite » est financée par des dons d’associations, voire directement par le tourisme quand la visite d’une classe est inscrite au programme d’un tour-operator. Il faut se rendre à l’évidence, là encore, la discrimination est encore d’actualité.
Sur le bord de la route, on commence à voir des troupeaux d’autruches. Quelques-uns sont sauvages, pour d’autres il s’agit d’élevages car la région d’OUDTSHOORN est réputée pour cette activité. C’est ce que nous allons découvrir maintenant … on s’arrête à « Highgate, ostrich show farm ». Cette ferme a été créée en 1938 ! La ferme est plutôt petite, traditionnelle, authentique, elle ne fait pas usine à touristes.
Accompagnés d’un guide parfaitement francophone nous allons tout savoir sur l’élevage de ce curieux volatile.
L’exploitation s’étend sur 3 000ha, 1/3 pour les autruches, 1/3 pour la culture de la luzerne et 1/3 pour les installations et habitations.
Il commence par nous présenter plusieurs espèces d’autruches, nous donnant des détails sur leurs origines, physionomie, noir et blanc pour les mâles, gris pour les femelles, leurs 19 vertèbres et leurs orteils … leur vie amoureuse (le mâle qui s’ébroue et rougit de désir !), les œufs (leur solidité, leur gestation), et bien sûr les débouchés d’un tel élevage : la peau pour le cuir utilisé en maroquinerie, réputé plus solide que le cuir de crocodile ; la viande pour la boucherie et les conserves, les œufs, décorés pour en faire des lampes ou des bibelots, pilés pour en faire une poudre calcaire utilisée dans la nourriture du bétail ; et évidemment les plumes !
Dans cette ferme, on fait aussi pousser la nourriture qui sera donnée aux animaux, des hectares sont donc consacrés à ces cultures. La ferme produit maïs et luzerne, mais le maïs n’est pas donné aux mâles reproducteurs, ça les rendrait trop gras. En Afrique du Sud on cultive deux sortes de maïs, le jaune (que nous consommons habituellement en France) est donné aux animaux, le blanc est réservé à la cuisine, réduit en farine pour faire cette polenta blanche que nous avons déjà vue.
En ce qui concerne les œufs, les autruches n’ont pas de saison particulière pour la ponte. Les œufs sont immédiatement prélevés tout en en laissant toujours un. La sélection des œufs fécondés se fait à la lumière par transparence, les uns seront menés à terme, les autres utilisés pour faire des objets décoratifs.
On peut tester la solidité des œufs en montant dessus ! un œuf pèse en moyenne 1,5 kg, l’équivalent de deux douzaines d’œufs de poules, et ils sont comestibles.
On va voir de plus près l’élevage, avec l’incubateur, grandes armoires chauffées où les œufs sont mécaniquement retournés comme le feraient les parents. Il y a aussi quelques autruchons, avant d’arriver à l’enclos des adultes, notre spécialiste des autruches nous propose de leur donner à manger : dos à la clôture, un seau entre les mains, on attend qu’elles se servent !! c’est rigolo !! un peu impressionnant mais sans risque ! les autruches tendent leur cou pour piocher dans le seau nous enveloppant presque la tête ! quelques grains de maïs déposés sur la tête sont vite picorés par les autruches sans faire mal.
On va ensuite dans l’atelier où deux femmes sont en train de traiter les plumes sans grand emballement ! une les trie, l’autre les taille. Les plumes sont récoltées à même la bête, sans avoir besoin de l’abattre, elles sont ensuite lavées, triées, teintées et travaillées. Dans une pièce à côté on voit les objets obtenus, une peau tannée, étalée, grande comme un mouton, les œufs peints ou sculptés, les éventails, boas, et chapeaux …
Nous déjeunons au restaurant de la ferme, une table nous attend, au menu de l’autruche ! en carpaccio et steak ! C’est très bon, la viande d’autruche savoureuse et tendre.
Nous allons ensuite faire un tour dans le magasin où sont vendus les produits manufacturés à partir des bestioles, il y a de très beaux sacs, portefeuilles, de gros œufs sculptés ou peints, des pâtés, des bijoux. Il y a aussi le squelette d’une autruche, de taille impressionnante, on voit bien toutes ses vertèbres et aussi la curieuse articulation de sa cuisse où on découvre que le genou est en fait dans sa cuisse ! on constate aussi que son cerveau est ridiculement petit, plus petit que son œil qui est lui gros comme une boule de billard.
Au revoir les autruches, la route reprend mais … hélas pour nous, la visite des Cango Caves ne sera pas possible, un éboulement s’est produit suite aux pluies abondantes et la route est coupée en attendant d’être déblayée. (après Table Mountain, on les accumule !!)
Nous avons plus de temps pour visiter OUDTSHOORN, la capitale mondiale de l‘autruche. La ville est fondée en 1848, alors qu’une petite communauté y vivait depuis près d’un siècle, sédentarisée autour de la première église de la région depuis 1839. Avec le développement de la colonie, l’approvisionnement en eau pose des problèmes et limite les possibilités de cultures, les fermiers vont se spécialiser dans le tabac et l’élevage des autruches qui remonte à 1864, stimulé par la mode en vogue chez les riches européennes. La plume d’autruche valait quasiment aussi cher que le diamant, c’était l’époque de « l’or blanc » ; jusqu’à ce que les lois du marché voient le cours s’effondrer en 1885, plongeant les éleveurs dans la faillite et la misère.
Cette riche production avait attiré des juifs, souvent lituaniens, demeurés sur place, la ville a été surnommée la « Jérusalem d’Afrique », en 1888 la première synagogue a même été construite, une autre en 1896 et une école hébraïque en 1904.
En circulant dans la ville, c’est l’église protestante de l’église réformée que nous voyons, la ville est plutôt jolie, avec des maisons de style Cape Dutch ou « Louisiane ».
C'est ici que nous faisons étape aujourd'hui ... encore dans un cadre hors du commun ... ce soir nous dormons dans un village de huttes ... en dur et tout confort ...
Encore une riche et dépaysante journée !
Demain sera une journée nature avec la visite d'une réserve naturelle à KNYSNA.
L’étape d’aujourd’hui était donnée pour 320 km
Les autruches bien sûr !!!
Une visite très bien organisée, la ferme de taille familiale, les explications complètes.
Belle découverte des produits réalisés à partir de l'élevage des autruches, de la boutique à l'assiette !
Il faut aussi souligner la beauté sauvage des paysages.
PROTEA HOTEL : L’hôtel est constitué d’un ensemble de bungalows ronds aux toits de chaume des petites huttes tout confort.
La chambre est très spacieuse, jolie, confortable et surprenante il faut bien l’avouer !! toute ronde, sans mitoyenneté, nous avons deux grands (grands) lits, beaucoup d’espace et une salle de bains bien équipée !!! ce soir encore on regrette de n’y passer qu’une nuit, surtout qu’on a aperçu la piscine …
Au déjeuner : restaurant du Highgate Ostrich Show Farm : l'autruche en carpaccio puis en steak, savoureuse et des efforts de présentation.
Au diner : restaurant de l'hôtel PROTEA : repas simple et savoureux.
Belle table et belle salle.
Une mention particulière pour le buffet du breakfast et le sourire de la cuisinière !!